Dans les profondeurs de la masculinité avec Marc Sinclair

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L’homme est-il foncièrement mauvais ? « C’est un débat vieux comme le monde » s’empresse alors de répondre Marc Sinclair qui le remet au goût du jour dans les pages de son premier roman, Suicide d’une masculinité toxique. Son personnage principal, Daniel dont on suit l’aventure, du rêve américain aux illusions perdues donnera-t ’il tort à Rousseau ?

Marc Sinclair écrit sans ambages et s’exprime de la même manière. Selon l’auteur québécois, « la fonction érectile de l’homme détermine à la fois sa morale et ses actes ». Ce déterminisme explique – t’il les débordements de Daniel ? L’auteur est convaincu que les hommes refusent d’admettre ce conditionnement, se voilant dès lors la face et justifiant leur comportement à travers les autres. Daniel découvre Nelly Arcan, autrice à succès, et c’est cette muse dont il choisi d’interpréter les propos à sa guise, en laquelle il trouve « une autorité féministe » qui le confortera dans ses agissements.

Le panache de Suicide d’une masculinité toxique

Le Miami des années 90, la promesse d’une réussite certaine, l’exubérance, les excès, les envies et aucune limite. Un rêve américain que Daniel, qui ne se refuse rien, va dévorer à pleines dents. Avec Nelly Arcan pour guide, il ne suit que ses pulsions, cherchant constamment à être dominé tout en s’imaginant être l’oppresseur, fasciné par la puissance sexuelle des femmes et des hommes qu’il croise. Miami décline ? Qu’à cela ne tienne, il vivra le rêve parisien des années 20, que d’après le québécois, « tout étranger a fantasmé ». L’auteur célèbre la culture de l’illustre ville de lumière, théâtre des frasques d’un homme persuadé de mener son destin. La rencontre, catalyseur d’un bagage de masculinité toxique porté par ce personnage, est au cœur de l’intrigue.

Bas les masques

Marc Sinclair transporte ses lecteurs dans des univers flamboyants auxquels il oppose une réalité au-delà des apparences. La « quintessence miamienne au top du bling masculiniste » déchue du fait de la superficialité d’une Amérique « frimeuse », les dorures parisiennes émaillées par un contexte social tendu, le faste argentin dénoncé par la misère des bidonvilles qui le finance. La disgrâce à tous les étages d’une civilisation esclave de ses passions dépeintes par l’auteur qui offre une critique sociale personnelle qui lui tenait à cœur.

La philosophie pour fil conducteur de Marc Sinclair

L’écrivain s’appuie sur Sade pour expliquer la masculinité toxique « cela me permet d’extraire les réflexions sadiennes et de les intercaler dans le livre sous forme de conversations philosophiques notamment » car si selon lui « Sade célèbre la masculinité toxique », il la décrit et l’explique avant tout de manière anthropologique, ce qui apporte un éclairage sur les choix de Daniel et sur son évolution. Un parcours qu’il ramène à celui de Nelly Arcan qui en son temps a connu la gloire avant la chute fatale qu’on lui connaît. Daniel subira-t ’il le même sort ? saura-t ’il se relever de sa propre chute ? Entre décente aux enfers et déchéances sociétales, l’auteur « se paie le luxe » de nous offrir une scène onirique qui « caractérise l’obsession de Daniel ».

Ce passionné de littérature met son savoir au service d’une plume honnête, provocante et complexe nous proposant une œuvre intense qui donne à réfléchir sur la vaste question de la condition humaine. Jusqu’à la fin, il sait tenir le lecteur en haleine. Qui du bien ou du mal, de la vie ou de la mort triomphera de ce périple irrémédiablement humain ?

Article & interview de Clara Elmira

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